Malgré les profits, Energizer tire la prise

LA cHAUX-DE-FONDS • L'entreprise américaine de piles ferme son usine comme elle l'a déjà fait en 2006 en France.

L’entreprise américaine de piles ferme son usine comme elle l’a déjà fait en 2006 en France.

La fin de l’entreprise américaine de piles Energizer à La Chaux-de-Fonds suscite une certaine émotion à travers la population.

Les propos tenus par les dirigeants politiques et par la presse se résument en quelques termes : c’est inévitable, ça fait mal, on apporte notre soutien aux travailleurs, on les aidera à rebondir !

On ne peut qu’être d’accord en constatant que les autorités politiques ne conduisent plus l’évolution sociale des collectivités. Celles-ci suivent ce que dictent les marchés. En conséquence, il ne leur reste plus qu’à apporter leur compassion à l’égard des victimes et les aider à « rebondir ». Ce terme odieux, bien que répandu, assimile les travailleurs à des balles de ping-pong, déplaçables, manœuvrables et jetables.

Les lois du marché « justifient » la prise de mesures inhumaines même au sein d’entreprises réalisant malgré tout des bénéfices conséquents. Des entreprises qui continuent d’anticiper leur avenir pour augmenter leurs profits. Cette économie libérale donne la préférence à ceux qui dirigent et qui organisent la société en fonction de leurs intérêts immédiats au mépris de ceux du peuple.
8 fermetures en Europe depuis 1995

Par ailleurs, Energizer n’en est pas à son premier coup d’essai. L’intersyndicale CGT-CFDT écrivait en février 2006 qu’en 15 ans, ce groupe a fermé 8 usines en Europe, entraînant la suppression de plus de 2’400 emplois. En 2006, l’entreprise fermait un site de 132 emplois à Caudebec-lès-Elbeuf (Seine-Maritime), après une première vague de 332 licenciements en 1998. A cette époque, les syndicats attendaient un rapport démontrant que la fermeture de cette unité était justifiée pour regrouper la production en Suisse et aux Etats-Unis, ce qui était jugé comme une absurdité par les syndicats français « puisque la main-d’œuvre y est plus chère qu’en France ». Aujourd’hui, Energizer ferme le site de La Chaux-de-Fonds parce que la main-d’œuvre y est trop chère ! Reconnaissons la logique de l’objectif ! En 2006, à Caudebec-lès-Elbeuf, les ouvriers, largement syndiqués, ont obtenu une indemnité de préjudice de 30’000 euros chacun, en plus des primes de licenciements légales traditionnelles, un congé de reclassement rémunéré de 8 mois et l’installation pour 18 mois d’une cellule emploi qui disposera d’un budget pour la formation des salariés de l’usine. Cette année-là, les syndicats observaient que cette usine conditionnait et cédait les produits finis à la filiale suisse, qui elle, réalisait le négoce et empochait les profits. « Pourquoi la Suisse ? On ne vous fait pas de dessins ! », écrivaient avec ironie les syndicats français.

Pour en revenir à la filiale de La Chaux-de-Fonds, la position des autorités politiques n’est pas facile d’autant plus qu’elle repose uniquement sur les effets de la fermeture et jamais sur les raisons de celle-ci. Pour notre part, nous restons convaincus que seule la remise en cause d’un système basé sur la croissance économique absolue peut résoudre les conflits du travail. Cependant, pour changer de système avec le peuple, il est indispensable d’imaginer pouvoir vivre mieux, mais autrement. C’est-à-dire en dehors de la logique industrielle et financière actuelle. Pour engager le changement, d’autres règles doivent être promulguées. Et pendant cette métamorphose, il faut assurer les possibilités de vivre dignement pour chacun.

Nous empruntons notre conclusion à Einstein : la stupidité, c’est de faire la même chose et d’attendre des résultats différents !