Philip Morris sans foi ni loi

Grand conseil vaudois • Bernard Borel s'attaque à la multinationale du tabac.

Bernard Borel s’attaque à la multinationale du tabac.

Une loi votée dans un pays démocratique ? C’est sans importance pour une multinationale comme Philipp Morris. C’est ce qu’on voit en Uruguay à propos du tabac et de la protection de la santé. L’entreprise intente un procès à l’Uruguay, arguant que sa décision d’interdire le tabac dit « light » et de couvrir 75% des paquets de cigarettes de messages d’avertissement des dangers encourus restreindrait « sa liberté d’action commerciale ». Le sang du député vaudois Bernard Borel, qui est aussi médecin, n’a fait qu’un tour. Peut-on laisser, sans broncher, bafouer la démocratie et enterrer des mesures de santé publique ? Et si cela se passait aussi chez nous ? Il a donc développé une initiative cantonale destinée à être adressée aux Chambres fédérales.

Notre gouvernement est en effet directement concerné. D’une part, parce que Philip Morris a installé son siège à Lausanne pour des raisons financières, économiques et opérationnelles. D’autre part, parce que la multinationale prétend mener sa procédure judiciaire dans le cadre du traité d’investissements bilatéraux qui a été signé entre la Suisse et l’Uruguay, traité qui est entré en vigueur en 1991.

Or, le Conseil fédéral ne veut rien entendre. Il invoque que notre pays est l’un des plus gros importateurs de capitaux avec un volume d’investissements de quelque 866 milliards de francs. Il a ainsi tissé le troisième plus grand réseau mondial d’accords bilatéraux de protection des investissements (APPI) qui dépendent de la Banque mondiale . Au nom de ces accords si précieux et si fructueux, le Conseil fédéral refuse d’intervenir auprès de l’APPI, comme le demandait la conseillère nationale Marina Carobbio, elle-même médecin. Il refuse de même d’adapter ces accords pour éviter qu’ils ne nuisent aux mesures de protection de la santé car « cela contreviendrait au but de ces accords qui consiste à protéger les investissements étrangers dans tous les secteurs contre les pratiques contraires au droit international ». Protéger les investissements mais pas la santé !

Lutter contre le tabagisme

Philip Morris avait commencé par prétendre inconstitutionnelle la loi uruguayenne, inspirée par l’oncologue Tabare Vasquez, ancien président du pays. Or, la Cour suprême de l’Uruguay a ratifié la constitutionnalité des lois anti-tabac. C’est pourquoi d’habiles juristes ont trouvé un biais, celui de l’APPI, pour détruire toute volonté de s’attaquer au lobby du tabac.

Bernard Borel revient donc à la charge et demande au Conseil d’Etat d’intervenir auprès des autorités fédérales afin de modifier les accords bilatéraux de protection des investissements (APPI) en y excluant les produits dommageables à la santé de la population, comme c’est le cas pour l’Uruguay.

Cette initiative a fait frémir d’indignation l’UDC, mais a été renvoyée à une commission.