L’apprentissage dual pris en défaut

neuchâtel • Conformément à ce qu’il avait annoncé dans son programme de législature, le Conseil d’Etat a mis en place, au cours de cette année, de nouvelles conditions d’admission dans les filières en école à plein-temps du secondaire II, dans les domaines du commerce, de la santé et du travail social, ainsi qu’en école de culture générale....

Conformément à ce qu’il avait annoncé dans son programme de législature, le Conseil d’Etat a mis en place, au cours de cette année, de nouvelles conditions d’admission dans les filières en école à plein-temps du secondaire II, dans les domaines du commerce, de la santé et du travail social, ainsi qu’en école de culture générale. Ces nouvelles conditions suscitent des inquiétudes, des critiques et des oppositions.

Ce qui est mis en cause, ce n’est pas tant le renforcement de la formation professionnelle duale, et, partant, une diminution de l’offre en école à plein-temps, mais la façon dont le Département de l’éducation s’y prend.

Le bon sens voudrait que l’on commence par valoriser qualitativement ces filières duales et par en développer l’offre quantitative. Actuellement seules 18% des entreprises neuchâteloises sont formatrices, soit la moitié de la moyenne suisse selon les chiffres de l’office fédérale de la formation professionnelle !

Or, pris dans l’urgence des réformes et de la frénésie des résultats immédiats, le département crée des états de faits et met la charrue avant les bœufs. Au lieu de commencer par rendre plus attractive la voie duale, au lieu de commencer par augmenter de façon significative le nombre de places d’apprentissage dans le canton, on commence par fermer des classes et à introduire un numerus clausus appelé « concours » à l’accès des filières en école à plein-temps.

Le département. met en place en un temps record un examen d’entrée pour les élèves qui ne satisfont pas aux critères dès le premier semestre de 9e.. Examen dont les modalités sont critiquées par ceux mêmes qui ont dû le fabriquer. Ces nouvelles conditions seront mises en application durant l’année en cours.
Les résultats de cet examen sont éloquents : 117 échecs sur 178 candidatures. 117 élèves pour lesquels, à moins de circonstances très particulières, la voie professionnelle de leur choix se ferme à jamais. Que deviendront-ils ? Trouveront-ils une place d’apprentissage ? Le département explique que 145 places d’apprentissage en 2 ans ont été créées et que c’est suffisant pour que nul élève ne reste au bord de la route !

Or, le département sait pertinemment que ces chiffres ne sont déjà plus actuels, que certaines entreprises se sont déjà retirées de l’offre, que d’autres ne renouvelleront pas l’expérience. Combien de places d’apprentissage créées par domaine où l’on ferme des classes ? On ne transforme pas d’un coup de baguette magique quelqu’un qui se destine au social en maçon ! Ne pas en tenir compte, c’est préprogrammer les ruptures de contrat, les échecs, les cheminements complexes avec tous les surcoûts qu’ils supposent.

En cas de besoin, dit l’Etat, nous ouvrirons des classes de préapprentissage supplémentaires. Mais est-ce bien sérieux ? Améliore-t-on vraiment ainsi les chances de ces élèves de trouver une place dans un marché sinon asséché du moins insuffisant ? Ne se retrouveront-ils pas dans la même situation un an plus tard, en concurrence avec une nouvelle volée ?

De plus, ceux qui auront la chance de trouver une place, il est à craindre que ce soit au détriment des élèves de Préprofesionnel qui peinent déjà aujourd’hui à trouver une place d’apprentissage. Cette manière de transférer par décret les élèves de l’école à plein-temps en dual avant même d’en avoir développé suffisamment l’attractivité et un nombre suffisant de places d’apprentissage ne peut mener qu’à l’échec.

Portant ces critiques au plan parlementaire, les groupes socialiste et PopVertsSol ont déposé une recommandation par la voix de Daniel Ziegler pour inviter le Conseil d’Etat à revoir sa stratégie en la matière et de surseoir à la mise en œuvre des nouvelles conditions d’admission dans les filières en école à plein-temps du secondaire II et de renoncer à la fermeture de classes dans ces filières à la rentrée 2011-2012.