Tous les Vaudois sont unis contre Novartis

Le parlement a soutenu les travailleurs licenciés, alors que le Conseil d’Etat prépare son calendrier d’actions.

Le parlement a soutenu les travailleurs licenciés, alors que le Conseil d’Etat prépare son calendrier d’actions.

Le Grand Conseil vaudois s’est montré parfaitement à l’unisson, à une abstention UDC près, pour soutenir la résolution présentée par le Parti socialiste : « Le Grand Conseil soutient les démarches du Conseil d’Etat et des autorités régionales visant à maintenir le site de Novartis à Nyon et les places de travail qui y sont liées. Dans cette période difficile, le Grand Conseil exprime également son soutien au personnel et à toutes les personnes touchées par les mesures de restructuration annoncées. »

Dès 13 heures, les employés de Novartis, les députés, les conseillers d’Etat Leuba et Maillard étaient massés sur les escaliers du Palais de Rumine et manifestaient à la fois leur entente, leur soutien aux employés et leur indignation.

Une modification de l’ordre du jour du Parlement a permis de faire d’emblée démarrer le débat à 14 heures, avec un si grand nombre de représentants des travailleurs de Novartis présents que les tribunes ne pouvaient les accueillir tous et qu’ils ont dû se contenter de suivre les discussions sur un écran géant.
Pour le POP-solidaritéS, Jean-Michel Dolivo et Bernard Borel ont relevé combien la fermeture de l’usine de Nyon était révélatrice des tendances prédatrices du capitalisme. Et de dénoncer que, profitant de la hausse du franc suisse, Novartis peut faire l’acquisition à meilleur compte de nouvelles sociétés à l’extérieur de la Suisse, comme on le lit dans son rapport annuel : « L’acquisition d’Alcon, le numéro un mondial de l’ophtalmologie, va très rapidement renforcer notre croissance avec un grand potentiel de synergie ».

Si l’on en croit l’Agefi, toute la branche pharma est en sursis et vit un tournant stratégique. Les produits hors prescription médicale et ceux de préparations chimiques de base sont susceptibles d’être fabriqués n’importe où, une fois que les recherches et le développement ont porté leurs fruits. Toute l’industrie pharmaceutique devrait se préparer à produire des volumes plus faibles mais avec des marges plus élevées. Mais comment vérifier ces affirmations sans que Novartis ouvre ses livres de comptes ?

Le Conseil d’Etat s’engage

Philippe Leuba a repris les rennes du département de l’économie après le décès de Jean-Claude Mermoud. Il a affirmé la détermination pleine et entière du Conseil d’Etat et s’est déclaré heureux du soutien manifesté. Il a annoncé une rencontre avec Novartis à Bâle d’ores et déjà agendée, des contacts avec son homologue bâlois mardi déjà, une rencontre qui devrait avoir lieu avec le conseiller fédéral Johann Schneider Amann et les représentants de Bâle-Ville. Il a insisté sur l’importance de prouver une réelle unité dans ce combat difficile. « Le temps des débats idéologiques aura lieu mais il faut faire preuve d’union pour garantir un maximum de succès. » Il espère compter aussi sur la délégation vaudoise aux Chambres fédérales et a dit préférer une certaine confidentialité des démarches à la transparence réclamée par certains.

Les employés de Novartis, qui avaient pris sur leur temps de congé pour manifester, ont pris acte du soutien réconfortant des politiciens. Mais où est la loi suisse qui protège réellement les travailleurs contre de tels licenciements ?

Christiane Jaquet

Le libéralisme réellement existant

commentaire • La mondialisation libérale nous entraîne dans la faillite.

C’est deux jours après les élections que Novartis annonçait la fermeture de son site vaudois de Prangins, avec à la clé 320 suppressions de postes. On comprend les dirigeants, tant la situation économique du géant bâlois est précaire : au troisième trimestre, le bénéfice a augmenté de 12% à 3,5 milliards de dollars, tandis que le chiffre d’affaire bondissait à la même période de 18%. Justifiant sa politique, le directeur Joseph Jimenez, a annoncé que « nos performances sont certes bonnes, mais nous devons faire face à un environnement difficile ». On se rassure en pensant que ses 13 millions de salaire annuel (36’000 francs par jour) devraient lui permettre de traverser cet « environnement difficile » sans trop de soucis.

Oui, il faut entamer une réflexion sur la « démondialisation »

« Défendre l’emploi, par amour de la Suisse », entonnent les relais politiques des multinationales et de la finance, PLR-PDC-UDC et autres Verts libéraux prétendument « centristes ». On voit ce qu’il en est : la politique de la droite, ce sont les délocalisations, les licenciements boursiers, les rémunérations indécentes… tout cela au nom du libre-échange et de la mondialisation libérale ! Les conséquences de cette politique ne profitant qu’à une poignée d’actionnaires-rentiers sont désastreuses : des employés sont licenciés et le canton de Vaud perd progressivement son savoir-faire industriel. La « mondialisation heureuse », dont la droite fait son cheval de bataille, fait disparaître les usines en même temps qu’elle réduit comme peau de chagrin le nombre d’exploitations paysannes, au nom bien sûr des « marchés ouverts ».

N’ayons pas peur des mots : oui, il faut évoquer un nouveau protectionnisme, basé sur des normes sociales et écologiques. Oui, il faut désormais entamer en Suisse les réflexions sur un processus de « démondialisation », des idées nouvelles développées notamment lors de la campagne des primaires du PS français par l’aile gauche du parti. Le modèle actuel entraîne le monde entier – à commencer par l’Europe – vers la faillite.

Indéfendable économiquement, le paradigme libéral est également intenable à moyen terme pour l’écosystème. Un autre monde est non seulement possible, mais de plus en plus urgent.

Julien Sansonnens