Le Conseil d’Etat malmène les droits des locataires

L'Asloca conteste l'invalidation voulue par Mark Muller de ses deux initiatives pour le logement.

L’Asloca conteste l’invalidation voulue par Mark Muller de ses deux initiatives pour le logement.

« Toutes les initiatives que j’ai rédigées ont été confirmées par le Tribunal fédéral à l’exception d’une seule. » Sûr de lui, Christian Grobet a défendu lors d’une conférence de presse les deux initiatives de l’Asloca que le Conseil d’Etat veut invalider.

En début d’été, l’association de défense des locataires a déposé deux initiatives soutenues par 14’000 signatures. Celles-ci visent à lutter contre la pénurie de logement, en fixant notamment la répartition des surfaces de plancher selon le principe d’un logement pour un emploi, à maintenir et à développer le parc locatif bon marché, à garantir que les surélévations d’immeubles ne soient pas destinées à des appartements de luxe, à renforcer la protection contre les congés-vente, ainsi qu’à lutter contre la spéculation foncière en limitant le prix de vente des terrains. Vaste programme ! « Nos initiatives sont des réponses simples aux dérives spéculatives du marché immobilier », assure Christian Dandrès, avocat à l’Asloca.

Le Conseil d’Etat, lui, juge que les initiatives ne respectent pas l’unité de la matière, « car elles contiennent chacune plus de vingt propositions », qu’elles sont contraires au droit supérieur, « en particulier aux règles de planification en matière d’aménagement du territoire et à la garantie de la propriété », et demande au Grand Conseil de les invalider.

« Lorsque l’enjeu est important, il ne faut pas s’étonner d’une invalidation », explique Christian Grobet, vice-président de l’Asloca. « La vraie raison est que le Conseil d’Etat est opposé à nos propositions. Mark Muller n’a qu’une volonté, c’est de démanteler les lois en faveur des locataires. »

Hasard du calendrier ou pas, Christian Dandrès souligne que cette demande d’invalidation intervient le jour anniversaire de la « paix du logement », ce protocole d’accord signé en 2006 entre Mark Muller et le Rassemblement pour une politique sociale du logement. « Depuis 2006, nous avons perdu près de 1’400 logements sociaux », souligne le député socialiste. « Il n’y a jamais eu de paix du logement en raison de l’attitude des propriétaires vis-à-vis des locataires. L’Asloca a toujours refusé de signer l’accord », précise Christian Grobet.

Les intérêts privés priment

La balle est maintenant dans le camp du Grand Conseil. Le parlement va-t-il suivre le Conseil d’Etat ? « La majorité de droite va invalider, c’est sûr, car ils ne veulent pas avoir cette votation avant les élections cantonales », répond l’ancien conseiller d’Etat. « Si la droite avait un peu de dignité, face à cette crise du logement, elle soumettrait nos initiatives au peuple. Mais non, les intérêts privés qu’elle défend passent avant tout », déplore Alberto Velasco, vice-président de l’Asloca.

L’association de défense des locataires devrait se pourvoir au Tribunal fédéral, ce qui ne sera pas la première fois. « On est jamais sûr de gagner un recours, mais nous avons ici des motifs qui sont forts. Heureusement qu’il y a le Tribunal fédéral, sans quoi de nombreuses initiatives auraient été mises à la poubelle », conclut Christian Grobet.