Qui pilote Mobilis ? En tous cas pas l’Etat

Le Canton n'a qu'une voix consultative à la direction de la communauté tarifaire.

Le Canton n’a qu’une voix consultative à la direction de la communauté tarifaire.

L’actuel chef du Département des infrastructures, François Marthaler, va prendre sa retraite. Inutile de croire qu’il va publier son bilan ou s’arroger des réussites comme d’autres de ses collègues de droite ne manquent jamais de le faire. A propos de Mobilis, il a même trouvé l’expression « piloter en coulisse » pour caractériser la modestie de l’Etat par rapport à la Communauté tarifaire qui comprend les puissants CFF.

La communauté tarifaire vaudoise Mobilis s’étend à la quasi-totalité du canton depuis le changement d’horaire des transports publics en décembre 2010 et c’est un grand succès. Les utilisateurs de Mobilis jouissent d’un seul billet pour tous les trains, trams, bus disponibles à n’importe quelle station du réseau. Les marges du canton sont aussi concernées comme Broye-Vully, Unireso (Nyon) et Onde verte (Jura-Nord Vaudois). Ce sont onze entreprises qui se sont associées pour permettre cette harmonisation du système de distribution et de contrôle des billets ainsi que la gestion des clés de répartition des revenus.

Questionné par une députée popiste, François Marthaler a fini par reconnaître que son département et le service de la mobilité se sont fortement impliqués pour inciter ces entreprises à collaborer ensemble dans le cadre de la Communauté tarifaire vaudoise (CTV). L’Etat a aussi assuré les principaux coûts d’étude et d’adaptation des équipements de distribution et de contrôle des titres de transport. Depuis lors, l’Etat participe encore pour 50% aux frais généraux de gestion dont le total est de 1’200’000 francs.

Mais Mobilis est une entreprise simple et privée, au même titre que n’importe laquelle dans le canton. Elle se gère et fixe elle-même les tarifs, le canton étant relégué au rôle de « client ». Son chiffre d’affaires s’élève à 160 millions de francs. Elle est dirigée par un comité directeur qui constitue l’organe suprême de la communauté. Ce comité directeur est composé d’un représentant de chacune des parties au contrat de société simple, toutes d’ailleurs bénéficiaires de l’argent de l’Etat.

Et justement l’Etat là-dedans ? Il se contente modestement d’un strapontin sous la forme d’une place pour un représentant… avec voix consultative. C’est ce que François Marthaler appelle « piloter en coulisse ». Une formule certes originale mais qui laisse pantois. L’Etat se démène, paie les études et la mise en place d’un système novateur et performant, participe encore aux frais de gestion et se voit attribuer, avec voix consultative, un strapontin qui pourra être occupé par un employé de l’Etat.

Cette splendide modestie est sans doute admirable moralement. Mais franchement, est-ce bien une place normale pour l’Etat qui créa cette entreprise et qui continue à la payer ? Cela lui donne-t-il le poids nécessaire pour défendre l’intérêt général et des utilisateurs et des contribuables ? Poser la question c’est y répondre. Mais voilà, cette question n’a visiblement pas effleuré le chef du Département des infrastructures…