Votre voisin, ce suspect

Dans deux semaines, le Conseil communal de Lausanne étudiera une proposition du PLR visant à instaurer une « surveillance mutuelle d’habitations », calquée sur le modèle en vigueur aux Etats-Unis. Que demande la droite ? Que les habitants décèlent des « actes malveillants » et les transmettent à la police. Pareille délégation de compétences pose...

Dans deux semaines, le Conseil communal de Lausanne étudiera une proposition du PLR visant à instaurer une « surveillance mutuelle d’habitations », calquée sur le modèle en vigueur aux Etats-Unis.

Que demande la droite ? Que les habitants décèlent des « actes malveillants » et les transmettent à la police.

Pareille délégation de compétences pose problème, et on imagine sans peine les débordements prévisibles d’une telle démarche : petits règlements de comptes entre voisins, rondes nocturnes, atteintes à la vie privée, sans même parler des dérives xénophobes qu’un tel système ne peut que favoriser.

Plus fondamentalement, c’est le modèle de société proposé qui doit être rejeté. Une société d’habitants qu’on imagine à la fenêtre, cachés par un rideau, scrutant à l’aide de jumelles les faits et gestes de leurs semblables. Un modèle sécuritaire où chaque riverain est un contrevenant potentiel, chaque piéton de passage un suspect en puissance, chaque voiture inconnue une menace éventuelle.

Et qui jugera de la « normalité » de tel ou tel comportement ?

Organiser des citoyens-miliciens pour parer au manque d’effectif des forces de police, voilà le projet du PLR en matière de sécurité.

Ce sont les mêmes qui, au nom d’impératifs budgétaires, refusent généralement l’engagement de nouveaux agents… Or le maintien de l’ordre, tâche régalienne de l’Etat, ne peut pas être délégué aux particuliers : se dirige-t-on vers un monde où l’on fera désormais justice soi-même ?