Les fonctionnaires paieront 40% de la recapitalisation

Le Grand Conseil est entré en matière par 95 oui, 37 non et 3 abstentions pour un crédit de 1,44 milliard destiné à assainir la Caisse de pension de l'Etat. Les employés du service public devront faire des sacrifices et passer à la caisse.

Le Grand Conseil est entré en matière par 95 oui, 37 non et 3 abstentions pour un crédit de 1,44 milliard destiné à assainir la Caisse
de pension de l’Etat. Les employés du service public devront faire des sacrifices et passer à la caisse.

Il y a deux semaines, 2’000 syndicalistes
chantaient sur la
Riponne : « Mallard et Boulis,
brouillard et malice ! »…

C’est que la volonté fédérale
d’imposer pour 2052 une couverture
de 80% de la Caisse de pension
de l’Etat (CPEV) exige un
important sacrifice des employés :
plus de cotisations, diminution de
6% des rentes et deux ans de travail
de plus. Sans parler de l’indexation
des salaires qui est remise en cause,
sous prétexte que les salaires n’ont
pas été baissés lorsque l’indice des
prix a diminué. L’Etat considère
que les employés ont ainsi bénéficié
d’un « bonus » qu’il faut rembourser !

Un accord a été durement négocié
avec l’Etat, mais seule la Fédération
des Sociétés de Fonctionnaires
(FSF) l’a signé, contre l’avis
des syndicats SUD et SSP. Depuis
lors, la commission parlementaire
a durement aggravé le projet sur
plusieurs points, par exemple avec
l’imposition d’importantes mesures
automatiques de restrictions
dépendant de la seule conjoncture,
sans possibilité de négociations
syndicales jusqu’en 2052 ! Le calcul
de la rente basé actuellement sur
les trois dernières années de travail
passera, selon le Conseil d’Etat, à
12 ans, mais pourrait être de 38
ans selon les mesures automatiques,
ce qui représenterait une
baisse de 25% des rentes. Pour la
commission encore, la rente pont
AVS doit être désormais une prestation
de la Caisse et non plus
dépendre du pilotage de l’Etat
comme aujourd’hui. Sous le prétexte
alambiqué qu’il s’agit d’une
« tâche d’assureur ».

Le Conseil d’Etat
a laissé s’aggraver la situation

Deux paliers de financement doivent
être respectés en janvier 2020,
puis à 75% dès janvier 2030. On
note dès lors qu’au 31 décembre
2007, le taux de couverture de la
CPEV était de 75,3%. Or, il est
actuellement de 64,39%, soit une
baisse de 11% en cinq ans. La
Caisse a ainsi perdu 1,5 milliard de
francs dans ce « capitalisme de
casino », comme l’a rappelé le
député du POP-solidaritéS, Jean-
Michel Dolivo. Sans la moindre
réaction du Conseil d’Etat, alors à
majorité de droite, qui savait fort
bien la correction que la Confédération
allait imposer.

Il faut ajouter aussi que de 1979
à 2000, l’Etat a amélioré des prestations
de la Caisse, ce qui était une
bonne chose, mais sans se préoccuper
de leur financement. Si une
telle mesure avait accompagné ces
décisions, la couverture de la caisse
aurait été au 31 décembre 2011 de
plus de 80%.

Ces arguments ont laissé de
marbre et le Conseil d’Etat, tellement
soucieux de ne pas mettre de
bisbille dans son entente fraternelle,
et la droite du parlement qui
s’est empressée de déclarer qu’elle
n’avait aucune responsabilité dans
la situation, puisque c’est la Confédération
qui impose une couverture
de 80%. Faisant mine d’oublier
que c’est cette droite elle-même qui
l’a décidé au parlement fédéral.

Le bonheur des actuaires
et des gestionnaires de fortunes

La coalition POP-solidaritéS a
tenté en vain de défendre la position
des syndicats et la défense des
employés. N’obtenant la plupart du
temps que ses propres voix. La
droite n’a pas manqué de rappeler
combien à ses yeux les employés de
l’Etat étaient des « privilégiés ». Et
de proposer de nouvelles mesures
encore plus restrictives sur les
principes de la CPEV, comme de
passer de la primauté des prestations
à la primauté des cotisations,
un dada du Vert libéral, Jacques-
André Haury. L’entrée en matière a
donc été refusée par les verts libéraux
et l’UDC ainsi que, pour des
raisons diamétralement opposées,
par le POP-solidaritéS. Quant au
groupe socialiste, tellement soucieux
de soutenir son leader
Maillard, il paraît avoir fait sienne
la maxime de Montherlant : « Il n’y
a de sacrifices valables que ceux
sur lesquels on se tait. »

Mais ce débat ne doit pas faire
oublier que les problèmes traversés
par les caisses de pension ne sont
que la conséquence du système de
capitalisation du 2ème pilier.
Celui-ci, soumis aux aléas de la
bourse et aux crises économiques,
n’a rien à voir avec le système
exemplaire de répartition qui a fait
le succès de l’AVS. On voit combien
la capitalisation voulue par la LPP
fait plus le bonheur des actuaires et
des gestionnaires de fortunes que
des employés.