« Les classes modestes doivent être représentées aux Chambres fédérales »

Élections fédérales • A Genève, le Parti du Travail et solidaritéS présentent un liste commune pour le Conseil national et le Conseil des Etats. Salika Wenger, députée cantonale et tête de liste pour le PdT, explique quels sont ses combats prioritaires. Interview.

«Les partis de droite disposent de beaucoup plus de moyens que nous pour faire campagne. Nous, nous allons dans la rue, discutons avec les gens, mais cela prend du temps», rappelle Salika Wenger. ©Carlos Serra

Pourquoi vous présenter aux élections fédérales?
Salika Wenger: Une partie de la population n’est pas représentée aux chambres, ce sont les classes modestes. Les Verts et les socialistes représentent les classes moyennes, les autres sont représentés par les lobbys et la droite, mais les personnes modestes n’ont aucun représentant à Berne, et c’est important qu’elles puissent compter sur un élu qui les incarne.

Si vous êtes élue à Berne, quels seront vos combats prioritaires?
Je m’intéresse en particulier à la politique menée par la banque nationale suisse. La BNS a confié à des banques privées la gestion des flux financiers, or, celles-ci continuent à spéculer et investir pour leur propre compte. Les bénéfices leurs reviennent, mais les éventuelles pertes sont payées par les citoyens! Cette politique met les avoirs des citoyens en danger. J’aimerais me concentrer sur ces questions. Je connais bien le sujet pour avoir notamment siégé durant plusieurs années en Commission des finances à Genève. Je m’y intéresse également car il s’agit d’un domaine habituellement réservé aux hommes. Souvent, on n’interroge les femmes que sur les questions sociales ou de la famille!

Défendrez-vous Genève en particulier?
Les banques genevoises sont déjà bien représentées. Je me battrai pour celles et ceux qui ne sont pas des millionnaires, tout en étant consciente que nous seront minoritaires. Nous espérons toutefois que la gauche combative parviendra à obtenir au moins trois sièges.

Justement, on peut se demander si la voie parlementaire et institutionnelle est la bonne voie pour changer les choses. D’autant plus lorsque l’on voit des situations telles que celle de la Grèce…

On peut changer des détails. Nous pourrons par exemple faire pression pour que loi sur égalité et notamment l’égalité des salaires entre hommes et femmes soient réellement appliquée. Nous pourrons aussi dénoncer des accords de libre-échange iniques comme Tisa, qui se négocie sans aucune consultation de la population et menace les services publics. Les finances sont aussi un thème important. Après la crise de 2008, de multiples déclarations visant a réglementer la finance ont été faites, mais aujourd’hui la situation est pire qu’à ses débuts. Va-t-on attendre la prochaine crise sans rien faire?

Vous parlez de l’égalité des salaires. Pour vous, la présence des femmes dans les instances politiques est un combat important?
Oui. J’ai toujours été pour les quotas. En Suède, cela a donné des résultats: il y a actuellement plus de 40% de femmes dans les instances politiques. Si on n’oblige pas les gens à voter autant pour les femmes que pour les hommes, avec des listes séparées, on n’y arrivera pas. Dans les conseils d’administration également, les hommes demeurent majoritaires, et c’est là que se situe le véritable pouvoir. Il faut intervenir également a ce niveau.

Vous dites vouloir représenter les classes défavorisées, populaires, mais comment les convaincre? Le succès du MCG, par exemple montre qu’elles ne s’identifient plus uniquement à la gauche.
Je rappelle chaque fois qu’il est possible que le MCG ment. En tant que députée au Grand Conseil genevois, j’observe que ce parti qui dit défendre les personnes modestes vote systématiquement avec la droite des coupes budgétaires qui affectent directement la population! Ce parti dénonce, fait du bruit, se fait le porte-voix de doléances, mais n’apporte aucune solution. Il est important que la population modeste comprenne qu’elle n’est pas défendue par des partis comme le MCG. Il y cependant aussi une guerre de moyens. Les partis de droite et le MCG disposent de beaucoup plus de ressources financières que nous pour faire campagne. Nous, nous allons dans la rue, un peu partout, discuter avec les gens, mais c’est clair que cela prend du temps.

A Genève, mais aussi ailleurs, la question de la libre-circulation ou des frontaliers est un sujet «chaud». Comment défendre les travailleurs dans ce contexte?

En 2005, le PdT genevois s’est opposé seul à la libre-circulation, réclamant que les syndicats négocient préalablement des vraies mesures de protection effectives des travailleurs, comme des contrôles sur les lieux de travail ou l’adoption d’un salaire minimum. A l’époque, on nous a traités de racistes, mais aujourd’hui tout le monde parle de renforcer les mesures d’accompagnement! Une fois la libre-circulation adoptée, c’est cependant plus difficile. Les patrons ont refusé de discuter! Aujourd’hui on se trouve face à des baisses de salaires, à une concurrence salariale. Face à cela, nous essayons de convaincre les travailleurs que ce ne sont pas les employés qui licencient d’autres employés, mais bien les patrons!

La gauche radicale genevoise n’a pas de siège à Berne depuis 2007. Comment l’expliquez-vous et quelles sont les ambitions pour cette législature?
Nous n’avons pas de siège depuis longtemps car la gauche combative est toujours partie séparée. Cette fois, nous avons une liste commune entre le PdT et solidaritéS et cela se passe bien. Nous espérons décrocher au moins un siège au Conseil national.