Un 9 novembre en résonance avec l’actualité

Genève • Comme chaque année, la gauche genevoise commémorera le massacre de 13 ouvriers le 9 novembre 1932 sur la Plaine de Plainpalais. Une manifestation en résonance avec les grèves annoncées dans les secteurs public et de la construction. L'occasion également de contester les réponses données à la crise migratoire actuelle.

Le 9 novembre 1932, l’armée tirait sur la foule, en faisant 13 morts et 65 blessés dans les rangs des manifestants de gauche antifascistes.

Le 9 novembre 1932, l’armée suisse tirait sur une manifestation d’ouvriers sur la Plaine de Plainpalais, à Genève, laissant treize cadavres et 65 blessés derrière elle. Les ouvriers y étaient réunis pour protester contre la tenue d’un meeting fasciste. 83 ans après ces événements, comme chaque année, la gauche genevoise s’apprête à commémorer l’événement. «Un devoir d’autant plus important que dans un contexte pourtant différent, il existe d’inquiétantes similitudes avec ce sombre passé», précise le tract invitant à la manifestation, en se référant en particulier à l’«augmentation vertigineuse des inégalités, comme dans la période de l’entre-deux-guerres». Une situation qui, selon les organisateurs de la manifestation, ne pourra que s’accentuer avec les offensives actuelles contre les assurances sociales, telles que la réforme de la prévoyance vieillesse 2020, ou encore la troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIEIII), «qui privera l’Etat de Genève de 700 millions d’impôts par année avec des conséquences désastreuses pour les employés et les prestations sociales».

«Au lieu de protéger les travailleurs par des lois, on propose de mettre les migrants dehors»
Les effets de cette réforme en termes d’austérité se font d’ailleurs déjà sentir. Cette année, la commémoration du 9 novembre se fera ainsi en résonance avec la grève de la fonction publique genevoise, annoncée pour le 10, et dont l’objectif est de contrer les mesures d’économies prévues dans le budget 2016 de l’Etat, dont quatre visent justement à anticiper les pertes de recettes dues à la RIEIII (augmentation du temps de travail, gel des embauches, facilitation des licenciements et blocage de l’annuité). La semaine sera également marquée par la grève annoncée des maçons pour le 11 novembre, qui vise à faire pression sur la société suisse des entrepreneurs dans le cadre du renouvellement de la convention collective de travail nationale du secteur.

Finalement, les organisateurs ont voulu inscrire la manifestation dans le cadre de la crise migratoire actuelle et en profiter pour rappeler leur message sur cette thématique: «Dans la prolongation des votations du 9 février, il s’agira de dénoncer une politique de droite qui, face à la pression sur les salaires, au lieu de protéger les travailleurs par des lois, propose de mettre les migrants dehors. Or ce ne sont pas eux mais les patrons qui exercent cette pression!», explique Emmanuelle Joz-Roland, du syndicat SIT, l’une des organisatrices. Face à la situation actuelle, «la grande bourgeoisie (rappelons que Monsieur Blocher est à la tête d’une fortune de plus de 3,5 milliards) redouble ses efforts, afin de détourner la légitime colère des classes populaires contre ses compagnons d’infortune étrangers. Pour ce faire, elle assume un discours toujours plus autoritaire et soutient, sans gène, les mouvements d’extrême droite. Une dynamique qui reste malheureusement efficace, tel que l’attestent les résultats des dernières élections au Conseil National», dénonce encore le tract d’invitation à la manifestation.

Pour marquer cette prise de position relativement à la question migratoire, un déplacement est prévu à la caserne des Vernets, afin de revendiquer son utilisation comme lieu d’accueil pour les réfugiés. «Il s’agira également de souligner que nous sommes opposés à l’utilisation de l’armée pour des raisons autres que logistiques», précise la syndicaliste, se référant à l’exercice CONEX 2015 réalisé en septembre dernier, qui a vu 5’000 soldats mobilisés pour un exercice fictif dans le cadre duquel il s’agissait de protéger les frontières suisses dans une Europe fictive où «les organisations criminelles sont puissantes. Les stocks de carburants et combustibles, de gaz et de céréales font l’objet de pillages et de sabotages, et les tensions ethniques provoquent un afflux massif de réfugiés en Suisse».