Le 19 décembre 2016, nous nous envolons vers l’Algérie depuis l’aéroport de Lyon. «Nous», c’est un groupe de 12 Neuchâtelois, Vaudois et Genevois, réunis pour ce qui sera pour la plupart un premier voyage sur le continent africain. Le groupe est diversifié: deux photographes, une infirmière, une apprentie, des salariés, des étudiants. Certains habitués à de tels voyages de solidarité, d’autres qui n’en ont jamais fait. Une partie de l’équipe est chargée de faire un inventaire des besoins en matière de maintenance d’installations solaires (voir article sur l’ADER-en page 5), une autre de récolter du matériel pour témoigner à notre retour. Ce qui nous unit tous: la volonté de découvrir et de pouvoir raconter ensuite. Au beau milieu de la nuit, après une longue escale à Alger, nous arrivons à l’aéroport de Tindouf. Dans l’avion, les femmes sahraouies se sont changées et elles portent déjà à l’arrivée leurs melhfas colorées, les hommes leurs djellabas. Ce sont les «expats», vivant en Europe pour une grande partie d’entre eux, qui rentrent dans les camps pendant les vacances d’hiver. A l’aéroport, les chauffeurs des jeeps nous attendent pour nous conduire aux camps, escortés d’abord par les militaires algériens puis sahraouis. Épuisés, nous arrivons après une ou deux heures de route au protocole de Rabouni, le secteur administratif des camps où tout voyageur doit être enregistré en arrivant. Nous y serons hébergés plusieurs jours, car le 14ème Congrès du Front Polisario auquel participent la plupart des responsables de la RASD se prolonge à Dakhla et les autorités sahraouies sont inquiètes pour notre sécurité.
Une grande dépendance à l’aide humanitaire
Les camps, appelés «wilaya», portent les noms de villes du Sahara occupé qu’une partie du peuple sahraoui a été contraint de quitter: El Ayoun, Dakhla, Boujdour, Ausserd et enfin Samara, où nous avons été hébergés après les quelques jours à Rabouni. L’accueil est plus que chaleureux. La famille chez qui nous vivons sort les habits de fête et sacrifie une chèvre pour célébrer notre arrivée. C’est la première fois qu’elle reçoit des étrangers dans sa maison, composée de petites chambres en terre et d’une grande tente appelée la «jaima», espace commun où père, mère, enfants et petits-enfants passent la majeure partie de leurs journées et de leurs nuits. Les repas du matin et du soir, et bien sûr le thé bien sucré, nous les prenons chez eux, tandis que les journées sont consacrées aux diverses activités: visites, photos, interviews, inventaires solaires. Au fur et à mesure des visites de dispensaires, hôpitaux, écoles, assistance sociale, des centrales de distribution, de gestion des déchets ou encore de stockage de nourriture, nous sommes impressionnés par le degré d’organisation de la société sahraouie. Il est frappant de constater le contraste entre, d’une part, le niveau de conscience des habitants, la prise en main des choses par les gens, et de l’autre, l’ampleur des besoins, le manque de tout. En effet, la vie dans les camps dépend presque à 100% de l’aide humanitaire internationale et de ses aléas économiques. Les choses sont plus difficiles encore depuis qu’en automne dernier, trois semaines de pluies incessantes ont détruit des dizaines de milliers de maisons et de bâtiments publics, tous construits en terre. Les gigantesques flaques d’eau laissées par les inondations se maintiennent encore au milieu du désert deux mois après. Malgré des conditions de vie extrêmement pénibles et précaires, une organisation et une solidarité sans faille ont permis à ce peuple pacifique et doux de tenir bon en attendant le jour tant désiré du retour sur ses terres. Quant à nous, nous rentrons avec une seule envie: le soutenir par notre témoignage, écrit, oral et visuel et réclamer avec lui qu’ait enfin lieu ce référendum promis et jamais réalisé.
Vous pouvez soutenir notre travail: En signant la pétition pour le référendum: www.westernsahara-referendum.org
En soutenant notre projet de photos: www.wemakeit.com/projects/saharan-refugee-camps
En assistant à l’une de nos expositions de photos: du 31 mars au 9 avril à la Galerie YD à Neuchâtel et du 22 juin au 2 juillet au forum de l’Hôtel de Ville à Lausanne.