Une attaque en règle contre les travailleurs

Suisse • L’UDC a tombé le masque cette semaine, s’attaquant frontalement aux conditions de travail des salariés en Suisse. «Elles font actuellement face à un feu nourri de la droite», dénonce le PS.

Emmenée par les ultralibéraux Thomas Aeschi et Magdalena Martullo Blocher, l’UDC s’est livrée cette semaine à une attaque en règle contre les travailleurs et les syndicats. Alors qu’elle vient de lancer son initiative «pour une immigration modérée», qui veut mettre fin à la libre circulation des personnes, elle a démontré sans gêne que son intention n’est nullement de s’attaquer qu’aux immigrés, mais à l’ensemble des travailleurs, et frontalement.

Un pouvoir «disproportionné» des syndicats

«Le niveau salarial étant beaucoup plus élevé en Suisse qu’à l’étranger, la politique cherchait à protéger la Suisse contre une pression sur les salaires. La gauche a réussi à imposer lesdites mesures d’accompagnement. Il en a résulté un lourd appareil de surveillance étatique, un pouvoir disproportionné des syndicats ainsi que des conventions collectives de travail ayant force obligatoire et imposant des salaires et conditions de travail “suisses’’», dénonce le parti de droite radicale dans un communiqué.

Et la richissime Magdalena Martullo-Blocher de s’indigner dans la presse contre des syndicats «profiteurs de la situation», qui auraient «trop d’argent, de pouvoir et d’influence politique». Plutôt piquant venant de la part d’une élue du premier parti de suisse, dont la famille fait partie des 10 plus riches du pays. Et l’aspect caricatural de la formule prêterait presque à rire si le sujet n’était aussi sérieux. En effet, le message est clair: à l’avenir, il faut que les employeurs aient les mains libres de pratiquer le dumping à leur guise, sans l’«entrave» que représente aux yeux de l’UDC toute forme de réglementation du marché du travail, que celle-ci soit ou non liée aux mesures d’accompagnement.

«L’UDC veut des salaires de niveau européen pour la main-d’œuvre en Suisse», dénonce d’ailleurs Travail.Suisse, qui n’a pas tardé à réagir tout comme l’ensemble du monde syndical. «C’est la première fois que nous subissons une attaque aussi violente», commente pour sa part Aldo Ferrari, vice-président d’UNIA, interrogé par La Liberté. Pour le syndicat, la revendication de l’UDC d’une fin des mesures d’accompagnement entraînerait «une augmentation de la sous-enchère salariale et une perte de milliers d’emplois, car de nombreuses entreprises correctes ne pourraient pas résister au dumping».

Inquiétudes quant à l’attitude des autorités fédérales
Au-delà des élucubrations de l’UDC, Travail.Suisse ne cache pas ses craintes quant à l’avenir des mesures d’accompagnement en général: attaquées «de divers côtés, elles menacent de devenir l’enjeu conflictuel pour un accord-cadre institutionnel avec l’UE. Bien que les mesures d’accompagnement aient représenté jusqu’ici une ligne rouge dans le mandat de négociation pour un tel accord, des signaux alarmants se multiplient en provenance du Département du Conseiller fédéral Ignazio Cassis avec le sacrifice partiel du dispositif des mesures d’accompagnement». Et de lancer un avertissement: «Dans un tel cas de figure, un tel accord-cadre n’aura aucune chance parmi les travailleurs et travailleuses». Le Conseil fédéral devait justement discuter mercredi, jour du bouclage de ce journal, de sa stratégie européenne.

Plus généralement, le parti socialiste dénonçait en début de semaine le fait que «les conditions de travail en Suisse font actuellement face au feu nourri de la droite», estimant que les partis bourgeois ont démontré à plusieurs niveaux «leur manque total d’intérêt pour la protection de la population active». De par cette attaque frontale contre les mesures d’accompagnement, mais aussi à travers une pression pour augmenter les heures d’ouverture des magasins ou leur refus de toute mesure visant, par exemple, à mieux soutenir les travailleurs et chômeurs âgés (voir notre article). «La droite n’a aucun respect envers les salarié-e-s. Les conditions de travail en Suisse ne donnent pas matière à négociation», a conclu la conseillère nationale Ada Marra.