Soins dentaires: Pierre-Yves Maillard critique la campagne de la droite

Vaud • La campagne sur les soins dentaires s’est invitée la semaine dernière au Grand Conseil vaudois. L’occasion de quelques dernières mises au point dans une ambiance animée et avec la participation remarquée de Pierre-Yves Maillard.

Les vaudois se prononcent le 4 mars sur l'inscription du principe d'une assurance pour les soins dentaires dans la Constitution.

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La réponse du conseil d’Etat à trois interpellations demandant des précisions sur les contours de l’éventuelle future assurance dentaire, contours déjà présentés publiquement il y a quelques semaines (notre édition du 9 février) était à l’ordre du jour du Grand Conseil, prétexte à ouvrir un débat sur le sujet… qui s’est prolongé pas loin de deux heures.

Pour rappel, la population se prononcera le 4 mars sur l’inscription du principe d’une assurance couvrant les soins dentaires dans la Constitution, mais les détails de sa réalisation devront, en cas de oui, être précisés ultérieurement dans une loi, si bien que de nombreux éléments ne sont pas encore fixés. Un état de fait qui a laissé la place à toutes sortes d’interprétations, en particulier de la part de la droite, férocement opposée à l’initiative, qui multiplie les arguments pour dépeindre une future assurance catastrophique (se gardant toutefois d’expliquer qu’en cas de oui, il ne dépendrait que d’elle de concrétiser une assurance solide couvrant largement les soins).

La droite contre les franchises?
«Je constate que les campagnes ne se font plus sur la base d’un corpus d’idées stable avec des arguments plus ou moins prévisibles de la part des uns et des autres. Désormais on engage des boîtes de communication très réactives, qui font feu de tout bois. On voit par exemple la droite s’ériger tout à coup contre le principe des franchises alors que tout au long de l’année, on l’entend dire au contraire que ces franchises devraient être augmentées!», a fustigé Pierre-Yves Maillard. Depuis l’annonce par le conseiller d’Etat de la possibilité d’inclure une faible franchise à l’éventuelle future assurance*, proposition qui devra du reste être discutée par le Grand Conseil, et n’est donc pas définitive, la droite s’est en effet engouffrée dans la brèche, critiquant à tout va la charge financière excessive que cela pourrait représenter pour une famille de 4 personnes.

«J’invite celles et ceux qui se prononcent aujourd’hui contre cette franchise à faire adopter une loi d’application qui n’en prévoira pas. Je me réjouis que cette question de la franchise ne soit pas admise par tous, aussi bien du côté des partisans que des opposants», a ironisé la députée socialiste Jessica Jaccoud. Mis face à leurs contradictions, plusieurs députés PLR ont admis qu’en cas d’acceptation de l’initiative, ils seraient les premiers à défendre la mise en place d’une franchise.

Un référentiel «de qualité»
Autre argument rabâché à tort et à travers par la droite en campagne, l’idée que la prise en charge des soins, que le Conseil d’Etat propose de baser sur le référentiel cantonal actuellement utilisé pour le remboursement des soins aux personnes bénéficiant des régimes sociaux, se réduirait à quelques rares traitements. «A l’entendre, on a le sentiment que ce référentiel est une sorte de médecine extrêmement basique, qui ne rembourserait quasiment rien. Ce n’est pas vrai. Près d’un tiers des factures que nous remboursons dépasse1000 francs. Le référentiel que nous avons est un référentiel de qualité qui rembourse des soins onéreux», a tonné Pierre-Yves Maillard. Et la dentiste socialiste Sonya Butera, parmi les rares de sa profession à soutenir l’initiative, de souligner que «l’orthodontie tout entière ne sera pas prise en charge, mais je peux vous dire en tant que dentiste scolaire que de nombreux cas le seront. Rien que cette semaine, une vingtaine des enfants que j’ai vus entrent dans les critères de remboursement du référentiel cantonal».

Le député Ensemble à Gauche Jean-Michel Dolivo a quant à lui rappelé la volonté des initiants, à savoir rembourser «toutes les prestations qui permettent d’assurer une bonne santé du patient souffrant d’atteinte à sa santé bucco-dentaire» et donc exclure uniquement «les soins de confort ou qui répondent à des motifs esthétiques». Et Jessica Jaccoud d’ironiser à nouveau à l’attention de la droite: «J’invite ceux qui seraient choqués ou déçus que certaines prestations ne soient pas comprises dans le référentiel cantonal à ajouter toutes les prestations qu’ils estiment devoir faire partie de ce référentiel lors des travaux de mise en œuvre de l’initiative».

Une «Lamal bis»?
Plusieurs députés de droite ont également brandi l’épouvantail d’une «Lamal bis», occultant royalement le fait que le système Lamal actuel, fonctionnant avec des assurances privées, des primes indépendantes du revenu et des franchises favorisant les riches en bonne santé, est pourtant le résultat direct de leurs propres conceptions politiques. «L’initiative fonde son financement sur une cotisation proportionnelle au revenu, ce qui n’a rien à voir avec les primes Lamal. Il s’agit d’un système solidaire, social, équitable», a rappelé Jean-Michel Dolivo, avant d’ajouter: «Je comprends tout à fait que la droite de cet hémicycle ait en horreur ce type de financement, puisqu’elle représente les milieux les plus aisés, les plus privilégiés, qui vont proportionnellement devoir payer plus».

Enfin, la droite s’est insurgée contre le contrôle qu’instaurerait l’assurance sur la facturation effectuée par les dentistes, une mesure qui reviendrait selon elle à remettre en cause l’honnêteté de toute une profession. «Ce que propose l’initiative est une certaine régulation de la tarification, afin d’éviter ponctuellement des tarifs abusifs. Le discours de la chasse aux abus, normalement est un discours souvent endossé par l’UDC», a ironisé à son tour Hadrien Buclin, d’Ensemble à gauche.
Reste à espérer que dans cet imbroglio, la population comprenne où sont ses intérêts.

*De 100 francs annuels pour les enfants et de 300 francs annuels pour les adultes, détartrage et contrôle annuels n’étant toutefois pas soumis à franchise