Quand Baudet fait son marché (public)

La Chronique de Renart • Ah, le français. Une langue de vipère, certes, mais parfaite en politique. Regardez nos élus. Servent-ils l’Etat? Ou se servent-ils «de» l’Etat?

Ah, le français. Une langue de vipère, certes, mais parfaite en politique. Regardez nos élus. Servent-ils l’Etat? Ou se servent-ils «de» l’Etat? De ce petit «de» dépend l’avenir d’un canton. Au hasard : Genève. Et aujourd’hui celui d’un élu. Au hasard: Baudet. Rappelons que l’animal préside l’ «exécutif». Soit en mode dico: «un pouvoir qui met en œuvre les décisions votées». D’où l’inconfort des votants: quelle décision mettait en œuvre Baudet en matant des bolides aux Emirats? Un mandat parlementaire pour limiter les émissions de CO2? Allez savoir ce que va encore nous servir le feuilleton médiatique…

Mais parlons d’un dossier justement délaissé par ces canards: les marchés publics. Le lien du magistrat avec l’immobilier et la construction n’est désormais plus à établir. Pourtant personne n’y lit l’explication possible de sa politique sur les temporaires. Rappelez-vous. Dans les marchés publics genevois, les syndicats voulaient limiter les temporaires à 10%. Les patrons à 20%. Baudet leur a permis 40%. Bon, l’affaire est aujourd’hui devant les tribunaux. Certains y verront la marque de fabrique du magistrat. N’empêche que tout ça vous emberlificote les neurones, non?

Et peut-être pas tant que ça. Peut-être qu’au final, la farce du Baudet va se résumer d’un: quand on peut prendre, pourquoi se gêner? Difficile pour les perdreaux de fliquer leur Conseiller d’Etat. Difficile pour les juges de le juger. Et probablement impossible pour le Baudet de ne pas aider tous ces gentils entrepreneurs, qui avaient eu le bon goût de garantir son élection. De cette comptine politique, la morale ne grandit sans doute pas, mais elle s’impose: si aucun parti n’est à l’abri des corruptions, il est plus facile de corrompre avec beaucoup d’argent…

 

Chronique tenue tous les 15 jours par Yves Mugny, auteur de La Faute au loup (éd. Cousu Mouche), www.yvesmugny.ch, www.facebook.com/Yves.Mugny/

Illustration: maou.ch