Un appel pour évacuer les camps de réfugiés

Solidarité • Des dizaines de milliers de réfugiés sont toujours bloqués dans des camps insulaires insalubres. Plus de cent organisations demandent au Conseil fédéral et au Parlement d’évacuer une partie d’entre eux vers la Suisse.

Plus de 20’000 personnes s’entassent depuis des années dans le hotspot de Moria sur l’île de Lesbos. (DR)

Dans Lesbos, la honte de l’Europe paru en janvier 2020, le sociologue Jean Ziegler dénonçait les conditions de vie dans les camps des îles de la mer Egée, où sont parqués plusieurs dizaines de milliers de réfugiés dans des structures prévues pour en accueillir environ 6000. C’est que la Grèce est le premier pays européen sur le chemin des exilés arrivant depuis la Turquie. De ce fait, elle s’est vu attribuer le rôle de chien de garde de l’espace Schengen par l’Union européenne. Les réfugiés qui y arrivent, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas refoulés directement par les garde-côtes ou les agents de Frontex, doivent être enregistrés dans des hotspots avant d’être (théoriquement) soit renvoyés, soit répartis entre les différents pays européens. Dans la pratique, plus de 20’000 personnes s’entassent depuis des années dans le hotspot de Moria sur l’île de Lesbos tandis que le système de relocalisation ne fonctionne tout simplement pas.

Des conditions sanitaires catastrophiques

Lundi de Pâques, 110 organisations suisses ont lancé un appel aux autorités pour leur demander de contribuer à l’évacuation immédiate des camps grecs en accueillant des réfugiés en Suisse. Les associations dénoncent une «catastrophe silencieuse». Les réfugiés ne bénéficient en effet d’aucune protection. Les soins médicaux sont loin d’être garantis et le droit de demander l’asile a été temporairement suspendu par le gouvernement grec. La situation dans les camps est désormais bien connue des citoyens européens: un robinet pour mille personnes, des distributions de nourriture en quantité insuffisante et souvent avariée, aucune sécurité pour les enfants et les femmes, qui risquent à tout moment de se faire agresser ou violer en sortant de leur tente.

Selon les associations humanitaires présentes sur place comme Médecin sans frontières, il est impossible, dans ces conditions, de suivre les instructions de sécurité pour contenir le covid19. La pandémie progresse en Grèce et dans de telles conditions, une contamination des camps conduirait inévitablement à de nombreux décès faute d’accès aux soins et au matériel médical nécessaire.

La Suisse doit participer à l’évacuation

Pour les signataires de l’appel, «la Suisse a montré à quel point il est possible d’évacuer des personnes avec la plus vaste opération de rapatriement de son histoire». Des milliers de voyageurs suisses étaient en effet bloqués à l’étranger au moment où les pays ont restreint les possibilités de voyage en raison de la progression de pandémie. Le DFAE a soutenu ceux qui n’arrivaient pas à rentrer par leurs propres moyens par des vols de retour, les milliers de personnes concernées devant ensuite respecter une quarantaine de dix jours. Maintenant que la plupart des Suisses bloqués à l’étranger ont été rapatriés, cette expérience pourrait être utilisée pour accueillir des réfugiés des camps grecs. Ce d’autant plus que l’ordonnance Covid-19 asile promulguée par le Conseil fédéral le 1er avril dernier prévoit que les installations civiles et militaires pourront changer d’affectation plus simplement pour servir au domaine de l’asile. Ainsi, il serait possible de mettre rapidement à disposition davantage de places d’hébergement.